L’Atelier Architectes est représenté par Guillaume Hazet [absent -et excusé!- pour cause de chantier] et son inséparable compère Sylvain Guy. L’effectif total de qui constitue l’équipe est de douze personnes (sept architectes, un ingénieur suivi de travaux, deux dessinateurs, un secrétaire technique et un responsable administratif). Après avoir couru deux semaines pour ce caler un rendez-vous, c’était ça ou rien avant des vacances bien méritées, nous avons enfin réussi à rencontrer Sylvain qui nous parle de la profession d’architecte.

Sylvain Guy, super à l’aise pour la séance photo devant la France administrative revue par Jace.
Sylvain Guy, super à l’aise pour la séance photo devant la France administrative revue par Jace.

De quoi on parle pour que nos lecteurs fassent connaissance?
De cette île que nous ne connaitrons jamais assez… De mes envies de voyages avec ma femme et mes enfants, de découvrir le monde pendant plusieurs mois, de rencontrer les hommes (et les femmes), ici ou ailleurs et m’enrichir de leur connaissance. De la beauté de la vie et de mes désirs d’entreprendre et de regarder devant moi.

Mais, tu es un poète …
Je suis attristé de voir beaucoup de gens de ma génération qui ronchonnent et ruminent dans leur bulle sans se prendre par la main pour faire changer les choses (sans d’avantage de commentaires…) !

C’est ce qui t’énerve en ce moment ?
Oui, avec l’hypocrisie. Que la différence entre moins-disant» et «mieux-disant» ne soit que théorique dans les marchés publics.

Promis ! On ne t’y reprendra plus?
Croire que la qualité peut être un critère reconnu !

Les répercutions de la «crise» sur la profession?
La crise frappe notre profession de plein fouet. C’est évident. En ce qui nous concerne, beaucoup de difficulté à pérenniser des équipes fiables, on rencontre des difficultés de trésorerie et en général les conditions générales qui se dégradent. Cette crise révèle les faiblesses de notre corporation qui ne sait pas trouver les moyens de faire face de manière confraternelle: baisse des prix, concurrence acharnée et en conséquence une perte de crédibilité auprès de nos maîtres d’ouvrage. Les répercutions se vivent aujourd’hui très concrètement, dans la gestion de nos sociétés au quotidien, des tensions sur les chantiers (entreprises en difficulté …). Toutes les professions liées à la construction du bâtiment sont touchées. Les conséquences vont se sentir longtemps, avec des prix de prestations «trop bas» pour permettre une qualité de service satisfaisante. Comment allons-nous sortir de ce mouvement vers le bas? Changer nos habitudes de travail? Passer moins de temps sur les dossiers et les survoler? Je ne sais pas comment notre profession va s’organiser, mais sans aucun doute avec grandes difficultés au vue de ce qui se passe aujourd’hui sur les appels d’offre.

Domaine de Montgaillard. Ph: C. Pit
Domaine de Montgaillard. Ph: C. Pit

Alors du coup : facile la vie en ce moment?
Pas vraiment, mais je pars en vacances ce soir… Heureusement qu’il y a d’autres sujets que le boulot et son wagon de difficultés.

Et bien justement, à part l’archi, qu’est ce que tu fais ?
En ce moment, c’est surtout la famille… et un peu de sport pour se tenir en forme!

Comment vis-tu notre métier aujourd’hui ?
Cette période de crise est peut être l’opportunité de se remettre en question. Difficile à dire… Je suis convaincu que nous sommes indispensables au processus d’élaboration d’un projet, et ce, quelque soit son échelle. Quand je vois la façon dont nous sommes sollicités, je pense que notre métier à encore de l’avenir… je ne suis pas inquiet à ce sujet. Par contre, il faut apprendre à se battre sur tous les fronts (conception, réalisation, règlementaires,…), dans des domaines qui évoluent en permanence. Voila pourquoi la formation est importante.

Ca c’est de la transition, merci ! La formation professionnelle?
Essentielle donc et à encourager dans des domaines de plus en plus vastes (environnement, juridique, financier, administratif…). Je pense que la Réunion à une place importante dans l’océan Indien (Afrique, Asie, Océanie…). Ces cartes sont à jouer pour le développement de l’île de La Réunion et pas seulement d’un point de vue touristique. La formation est importante pour être présent sur des territoires appelés à se développer et des domaines en constante évolution, dont les architectes sont les garants. Sur le plan environnemental, les architectes doivent passer le cap du «bon sens» et rester à niveau pour avoir la maîtrise de l’ensemble des outils «environnementaux», mais je ne parle pas de HQE … En effet, les architectes intègrent au quotidien, les notions environnementales dans leurs projets et sont les garants de l’acte de bâtir au mieux des bâtiments qui prennent en compte naturellement l’aspect développement durable.

Marché couvert de Saint-Benoît
Marché couvert de Saint-Benoît

Quelles sont tes priorités lors de la conception d’un projet ?
C’est un lieu commun de rechercher la satisfaction de notre client. Prévoir des équipements fonctionnels et pérennes, adapté au site dans lesquels nous intervenons. S’intégrer dans un environnement en minimisant au maximum notre impact. Ne pas oublier que nous ne sommes que de passage ici et que tous nos actes ont des conséquences directes pour l’avenir et les générations suivantes !

Justement, j’aimerai aborder le développement durable à la Réunion.
Un vaste sujet qui doit faire l’objet de tous nos efforts et nous devons réussir ce rendez-vous avec la population réunionnaise. Aujourd’hui, tout le monde en parle et c’est bien. Il faut faire le tri, ne pas se laisser aller à la facilité et poursuivre nos recherches. Mettre en commun nos connaissances et notre expérience sur ce sujet. Merci à ce propos, Catherine Morel notre consœur du CAUE pour la mise en place des formations mettant en contact des personnes et qui, je l’espère pourront permettre de créer un réseau. Il nous faut avancer tous dans le même sens sur ce sujet pour aboutir à une amélioration globale de notre cadre de vie. En est-on capable ?

Comment vis-tu l’architecture au quotidien ?
Malheureusement, trop souvent au téléphone et dans la gestion administrative… Je vis l’architecture comme une passion à entretenir tous les jours. Notre métier est prenant, passionnant, dont l’objectif est d’aboutir à l’amélioration de notre cadre de vie. C’est une chance et une responsabilité. Voila mon moteur.

Quelles sont tes attentes vis-à-vis de la formation, du Croar, de la Région, de L’Etat, même d’un point de vue utopique,  que voudrais-tu ?
Toutes les initiatives actuelles sont positives (plan de relance, Gerri…). Il faut de l’initiative politique mais il faut aussi sortir des habitudes et des schémas préétablis. Nous avons la chance d’être dans un département qui connaît un taux de croissance important. Il en va de la responsabilité des maîtres d’ouvrage de faire les bons choix… Pour l’Ordre des architectes, on ne sait pas assez ce qu’il s’y passe. Je ne dis pas cela par simple critique, je pense que c’est une réalité. Sans doute une «certaine» défense de la profession et de ses acteurs (!), mais la communication autour de cela est trop limitée, il me semble nécessaire de réunir l’ensemble de la profession à d’autre moment que pour l’AG, pour pouvoir échanger et mettre en place un certain nombre de chose en concertation avec l’ensemble des architectes. Mais il faut s’engager et je remercie ceux qui y sont.

Vous nous parlez d’un projet qui vous tient à cœur
L’agence répond favorablement à tous les projets (quelque soit leur nature) qui se présentent. C’est un choix. Deux projets nous ont particulièrement satisfaits : le marché couvert de Saint-Benoît et le Centre de Séminaires de Montgaillard. Dans les deux cas, la relation avec le maître d’ouvrage a été très constructive. Nous avons travaillé dans une confiance réciproque et je pense que les résultats sont le fruit de cette collaboration intelligente. Une grande implication du maître d’ouvrage, une qualité d’écoute réciproque.  Un bon projet, c’est d’abord un bon maitre d’ouvrage…. Pour le reste, on fait de notre mieux.


Entretien: Christophe Devaud
Juillet 2009