Marseillais, Olivier Brabant ? Pensez-vous, il suffit qu’il évoque la cité phocéenne pour reprendre l’accent. Du pastis à l’OM en passant par «l’immeuble du Corbu»  qu’il voyait de la fenêtre de sa chambre, Olivier Brabant n’échappe à aucun cliché de Marseille. Il les revendique, nous raconte sa ville et se livre sur son métier.

Olivier Brabant pose avec une de ses premières maquettes sur la plage du Prado à Marseille.
Olivier Brabant pose avec une de ses premières maquettes sur la plage du Prado à Marseille.

Olivier Brabant, on va parler de Marseille…

OK, mais avant, je vais chercher la bouteille de Pastis parce que si on parle de Marseille, c’est obligatoire…

Juste derrière votre bureau, il y a une photo d’une route à Marseille, mais il n’y a rien d’autre qu’une falaise et un panneau de limitation de vitesse où l’on peut lire : « Attention vous êtes en ville. »

C’est une photo que j’adore. On est sur la route des Goudes, un quartier de Marseille qui commence à être « boboï » alors que ça a toujours été un quartier de misère, très mal famé, abandonné aux vagues, au mistral que tu prends en pleine tronche. Un environnement un peu cassé, abîmé, d’anciennes usines. C’est sublime. C’est le bout du bout, une impasse. Tu es à Cale Longue et  tu poses ta voiture. Pour moi, c’était Ushuaïa, à un quart d’heure du centre-ville de Marseille.

Si je vous dis Marseille, ça vous évoque quoi tout de suite ?

J’y suis né ! J’ai grandi dans les quartiers Sud, près de l’hippodrome Borelli, les plages du Prado et… le Corbu. : en ouvrant ma fenêtre je voyais le Corbu.  C’est très marrant. Je n’y avais pas vraiment fait attention jusqu’à très récemment mais j’ai grandi avec ça en face.

Édifiée entre 1947 et 1951, la Cité Radieuse est  une construction imposante de 165 mètres de long par 24 de large et 56 de haut.
Édifiée entre 1947 et 1951, la Cité Radieuse est  une construction imposante de 165 mètres de long par 24 de large et 56 de haut.

On l’appelait vraiment la maison du fada ?

Oui, ça a toujours été la maison du fada, du malfoutu. Car le Corbu, c’est le prince du malfoutu. A l’époque, dans les années 50, quand il construit son unité d’habitation, il fait avec les moyens du bord. Le béton était un peu pourri.

Est-ce que c’était un lieu populaire à Marseille ?

On y allait souvent, on connaissait tous des gens qui habitaient dedans, on jouait dans le parc au pied de l’immeuble. J’ai grandi avec ça. La dernière fois que j’y suis allé, c’était il y a six mois avec mes marmailles. J’ai encore compris des choses : ce couloir que je trouvais sombre, en fait, c’est comme une rue centrale. J’y ai vu des gamins qui venaient se chercher d’appart en appart et ils avaient des skates, des vélos. D’un coup je me suis dit, ce n’est pas un couloir mais une rue ! Je n’avais pas compris. Bien sûr, Corbuil l’avait pensé.

Le Corbu, c’est le prince du malfoutu

On a du mal à comprendre la fascination du Corbusier chez les architectes français

C’est le grand-père qu’on a tous rêvé d’avoir. Bizarrement, à l’école d’archi, comme mes profs étaient des fans absolus (certains avaient travaillé avec lui), eque tout le monde, à un moment donné habité, loué dans le Corbu, un duplex, un triplex, j’en étais un peu gavé. C’était à 10 mn de l’école d’archi, on allait le dessiner, le mesurer ; moi j’en pouvais plus. Pendant longtemps, je l’ai mis de côté cet immeuble. Et puis là, je sais pas si c’est en vieillissant mais j’y revenu, vraiment avec énormément de passion. Je comprends enfin. Je suis fasciné par son courage et sa volonté. Il fait ça juste après guerre ! Les années 50 à Marseille, ya rien autour, c’est la campagne. Et lui, il vient créer une petite ville verticale et sociale, même si ça a été vite perverti et colonisé par les professions libérales. Ils ont vite viré les pauvres. Il y a eu des dentistes, des toubibs des notaires… des archis. Très vite, c’est devenu très chic et puis, les bourgeois sont partis plus loin dans des villas parce que le béton « ça va un moment » et ce n’était plus classe. L’immeuble a été recolonisé par des foyers plus modestes et puis hop, les quartiers Sud redevenant à la mode, voilà les bobos.

La Cité Radieuse
La Cité Radieuse

En quoi, cette unité d’habitation révolutionne l’architecture ?

Attention, je vois aussi les défauts: le Corbusier maîtrisait relativement bien la protection solaire mais il captait moins les problématique aérauliques dans les bâtiments ; mais ça, on ne lui en veut pas, c’était il y a 60 ans. Avec le recul de l’expérienceje me rends compte de l’intelligence du bâtiment. L’eau, le chauffage collectif, la ventilation collective Dans le conceptil y a un partage, il a fait fonctionner tous les services à la verticale ; il s’est cassé la tête pour faire fonctionner 300 appartements ensemble. Et sa coupe… Sa coupe est magnifique. C’est la plus belle coupe du monde sans mauvais jeu de mot. La coupe du  bâtiment, sur le duplex et la rue intérieure, c’est à tomber par terre d’intelligence.

Finalement, au départ, ce qui est novateur, c’est le concept ?

Oui, au départ, il y a une belle idée sociale, une utopie : partager, vivre ENSEMBLE, se dire que si le béton est pourri c’est pas grave parce qu’il offre beaucoup plus d’espace ; les logements sont traversants, les logements sont des duplex, ils ont des balcons des deux côtés, il y a une toiture terrasse sur laquelle on peut faire son footing, il y a une piscine, une maternelle, un gymnase…

Olivier Brabant revient régulièrement à la Cité radieuse, ici dans le gymnase avec ses enfants
Olivier Brabant revient régulièrement à la Cité radieuse, ici dans le gymnase avec ses enfants

Pourquoi ce bâtiment n’a pas fait école dans la reconstruction d’après guerre ?

Je ne sais pas. Ce qui est terrible, c’est ce qui s’est construit autour. Ça a été terrifiant, là,c’est de la cage à lapin. Tout ce qu’il a donné (ses apparts font 108 m2), des services à l’intérieur, des salles collectives, de réunion, le parc au dessous, la crèche au dernier étage, le gymnase, n’a pas fait école. C’est l’histoire de tous les modernes des années 50, d’ailleurs à la Réunion on a l’exemple avec Jean Bossu qui était un élève de Corbu et qui a la même problématique. Moi, ce qui me fascine, c’est que ces bâtiments ont 60 ans. La prise de risque à l’époque ! 

Les architectes d’aujourd’hui ne prennent plus de risques ?

Aujourd’hui, je ne dis pas que ce n’est plus possible, mais c’est extrêmement difficile de proposer des choses différentes à des maîtres d’ouvrage. Il faut imaginer que lorsque le Corbu fait ça à Marseille, il n’y a pas d’équivalent en France. Quand Bossu créé ses bâtiments à La Réunion, on passe de la case créole en bois sous tôle à des bâtiments en béton avec des casquettes, des trucs très très bizarres… C’est un choc qu’il faut que les maîtres d’ouvrage acceptent. Et, à l’époque, il ont accepté.

Les programmes sont souvent des copiés collés de normes

Aujourd’hui, les maîtres d’ouvrage ont pourtant une culture de la ville, de l’architecture. Finalement, est-ce que ce ne sont pas les architectes qui s’autocensurent ?

Allez, pas de langue de bois. Surtout que ça va être lu par mes confrères…. Je pense que souvent, il y a une certaine frilosité… Renzo Piano, architecte célèbre, parle de la désobéissance. Il a écrit un bouquin magnifique là-dessus qui doit être la bible de tous les architectes et qui décrit la nécessité pour l’architecte de changer son point de vue, de regarder différemment dès le programme. Ce qui veut dire que lorsqu’on reçoit un programme, il faut le discuter. La discussion, c’est le job de l’archi ! C’est se dire: discutons. Ce n’est pas parce que je suis bavard ou que “je sais mieux que les autres”. Discutons ensemble pour faire évoluer les choses et arriver à un projet meilleur et partagé, sur du fonctionnement, l’interprétation de la norme. On se rend compte que dès qu’on commence à poser des questions, il y a des pistes. On peut ouvrir des brèches; mais c’est beaucoup de pédagogie, d’énergie. Il faut être convaincu que plus on partagera au départ avec le client, le bureau d’études, l’archi et meilleur le projet sera. Le problème des maîtres d’ouvrage, c’est qu’ils veulent souvent faire appliquer à la lettre le programme: pas de discussion possibleA la base, les programmes sont souvent des copiés-collés de normes. C’est comme que pendant des années on traîne des copiés-collés  de contraintes hallucinantes. Mais on peut changer beaucoup de choses si on ouvre la discussion. Encore une fois, c’est un peu l’art de la conversation. Pour moi, l’architecture, c’est la conversation.

Et du combat…

Oui, c’est ce que dit Rudy Ricciotti: l’architecture est un sport de combat. Bon, moi, ce qui m’intéresse, c’est plutôt de convaincre les gens plutôt que de les combattre. Par notre persuasion, on va pouvoir faire évoluer les gens et le projet. Pour moi, s’il n’y a pas cette écoute, le projet ne se fait pas. Ou alors, ça veut dire qu’on fait toujours le même bâtiment !

Mais ce n’est jamais le cas…

Une fois que j’ai fait un bâtiment, la pire des choses qui pourrait m’arriver, ça serait de me retrouver avec un programme similaire et de me dire: ça je sais faire.  Combien de fois je l’ai entendu quand j’étais jeune archi à Marseille. « Çà on connaît. » Mais je connais quoi ? Le site est toujours différent. L’uniformisation est terrifiante pour les architectes.

«S’il y a une permanence dans mon travail, c’est la prise de risque et la prise en compte du climat»
«S’il y a une permanence dans mon travail, c’est la prise de risque et la prise en compte du climat»

En même temps, vous tous, architectes, vous avez abandonné le marché de la construction individuelle et contribué indirectement à cette uniformisation du territoire, avec ces lotissements qui se ressemblent tous…

Au début de ma carrière, j’ai un peu travaillé chez l’ennemi : les constructeurs. L’habitat pseudo rustique avec le crépi et la pincée de tuiles, la cigale au dessus de la porte, j’en ai dessiné pas mal ( la cigaloune, on appelle ça) et je vois à quel point ça a été rationalisé. Mais tout dépend comment elle est faite. Sur la rationalisation de la construction, je suis un grand fan de Jean Prouvé, un ferronnier devenu ingénieur qui a enseigné aux arts et métiers. Toute la métallerie du Corbu d’ailleurs est faite par Jean Prouvé. Il a conçu des maisons tropicales magnifiques. Le mot rationaliser, ce n’est pas un gros mot quand c’est Prouvé, mais quand c’est un cigalouneur … En même temps si j’ai un lotissement entier de maisons de Jean Prouvé, c’est une catastrophe

 On parle beaucoup en ce moment de la remise en cause du système à la française : des architectes qui travaillent comme des petites structures artisanales qui ne sont plus adaptées

Mais moi, je me considère et me revendique comme un artisan. Mon objectif, ce n’est pas de faire des énormes buildings sur toute la planète. Bon, il faut dire qu’on ne me la jamais proposé ... Je me sens plus proche de Glenn Murcutt, l’architecte australien, que des« starchitectes » qui parcourent la planète pour poser leurs gestes architecturaux, d’Abu Dhabi à Shangaï Glenn Murcutt, c’est un artisan, et même un agriculteur, il dessine et construit dans le milieu qu’il connaît, où il peut donner du sens,  il élabore des constructions écologiques en harmonie avec le climat et le paysage qui lui sont familiers, qu’il comprend.

Quel projet rêveriez de faire à La Réunion ?

Et ben tiens : une unité d’habitation tropicale… Ça me trotte bien dans la tête. Mais il faudrait que je trouve le maître d’ouvrage qui accepte de faire ça. Ca serait un gros challenge. Parce que je ne fais pas de logements, mais le logement m’intéresse. Une unité d’habitation dans les Hauts, ça serait super.

Oui mais la densification est un gros mot à La Réunion…

C’est notre seule chance. Plutôt que de faire 50 opérations qui vont miter le paysage, il faut peut-être mieux y aller carrément et faire une opération de 300 logements dans des unités.  Et si on en plantait le long de la route du littorale ? Moi j’aimerai travailler sur des ponts habités à La Réunion. La façon dont on pourrait mixer de la circulation, d’autres activités avec du logement…Mais disons que de façon plus pragmatique, mon rêve, c’est le prochain projet.

L’architecture est un sport de combat

C’est quoi le prochaiprojet ?

Je ne sais pas. C’est de plus en plus difficile de faire des concours à La Réunion, le prochain, il est peut-être dans très longtemps et peut-être jamais… Mais bon. Il faut qu’on expérimente sinon ça n’a pas de sens.

Cnécessite d’avoir toujours la passion la foi

Oui, pour l’instant je l’ai toujours mais quand je ne l’aurai plus, j’arrêterai.

Comment vous vivez la contrainte de l’empilement de normes ?

Forcément mal. La norme nous renvoie à un bâtiment qui est très peu ouvert, très peu vitré, qui ressemble à tous les autres: la boîte à chaussure du supermarché. C’est le questionnement permanent, avec les entreprises, les pompiers, les contrôleurs techniques, c’est presque systématique. D’ailleurs, il vaut mieux discuter avec les pompiers qui sont plus dans le pragmatisme et la logique de l’expérience.  L’avis défavorable, c’est notre quotidien. Pour un contrôleur technique, le bâtiment idéal, c’est un bâtiment en béton qui n’a pas d’ouvertures et qui est climé Alors quand toi tu fais tout pour avoir des bâtiments ouverts, ventilés… On peut déroger, discuter mais si on a beaucoup de « non conformité », c’est compliqué avec le maître d’ouvrage. On a toujours le cul entre deux chaises.

Si vous deviez définir votre architecture, ce serait quoi ?

Sil y avait une permanence dans mon travail, ce serait la prise de risque et la prise en compte du climat. Ma matière première, c’est le vent. C’est une matière gratuite, disponible. Je me protège du soleil, j’isole et j’utilise le seul matériau gratuit. Après, pour l’utiliser… J’essai de faire des bâtiment simple, mais c’est complexe de faire simple.

C’est à dire ?

Le domaine dans lequel on a beaucoup oublié et sur lequel il faut revenir, c’est le climat. La tendance actuelle en métropole de dire: je fait des thermos étanches, et je suis HQE et je ne sais plus quoi, ça veut dire qu’on construit des bâtiments totalement imperméables au climat. Nous à La Réunion, on a la chance inverse de dire: c’est le climat qui fait le bâtiment. On ne peut pas lutter contre. On doit faire avec, et de manière intelligente. Alors peut-être que l’étéon aura un peu chaud et peut-être même que l’hiver, on aura un peu froid. Ca, c’est un de mes leitmotivs : comment on va aller chercher ce petit air qui circule.

Sur le projet de l’auditorium du Moufia, il y a pas d’extracteurs, pas de brasseurs d’air. Le bâtiment fonctionne de manière passive.
Sur le projet de l’auditorium du Moufia, il y a pas d’extracteurs, pas de brasseurs d’air. Le bâtiment fonctionne de manière passive.

Un exemple sur un de vos derniers projets ?

Je suis fasciné de voir que les effets que l’on utilise dans nos bâtiments, qui sont des effets de pressions et de dépressions, de puits dépressionnaires, de cheminées, et bien ces effets sont utilisés depuis que l’homme existe. Ce sont des choses simples. Après, il faut arriver à travailler avec des gens qui arrivent à modéliser tout ça, parce que la mécanique des fluides c’est très complexe. Je suis totalement incapable de la maîtriser. Je travaille avec le laboratoire Eiffel à Paris qui passe mes maquettes en soufflerie, tous les derniers projets publics qu’on faits sont travaillés comme ça. On passe en soufflerie la maquette et le labo teste la porosité du bâtiment. On met des capteurs, on mesure comment l’air circule dans le bâtiment, comment il rentre quelle pression sur la façade et à l’intérieur. Quelle est la pression à la sortie On modélise les vitesses d’air à l’intérieur du bâtiment. A force, on a progressé sur la compréhension du mécanisme du vent. On sent un peu mieux les choses même si ça reste encore très intuitif.

La clim’, c’est un non sens ?

Quelquefois, elle est obligatoire, pour un hôpital, un bloc opératoire. Le challenge, il est sur l’optimisation en ventilation naturelle de ces bâtiments qui doivent malgré tout être climatisés. Car ils ne doivent pas être climatisés du 1er janvier au 31 décembre. Ce qui nous intéresse, c’est de dire: on va optimiser le bâtiment pour qu’il fonctionne 8 mois de l’année en ventilation naturelle et puis peut-être qu’on mettra de plus en plus tard la clim dans la saison… On va l’isoler, protéger les parois du soleil, on va sur ventiler et une fois qu’on a ça, on aura fait notre job. Après, on s’interroge avec le maître d’ouvrage: est-ce que ça passe sans clim ? Est-ce que le pourcentage d’inconfort en janvier et février est acceptable ou pas. Sur l’auditorium du Moufia, on s’est mis d’accord: on fait des simulations en soufflerie et après, le juge de paix c’est le bâtiment. On l’a construit, on le laisse tourner un été austral et on lui laisse une chance de montrer ce qu’il a dans le ventre. Dans un an, s’il faut on mettra la clim, et on pleurera, on l’a mettra mais c’est prévu dans le marché en tranche conditionnelle. Cette solution a été acceptée par le maître d’ouvrage. Au final, si le bâtiment fonctionne sans clim, ils ont économisé de l’investissement et du fonctionnement. Ce qui sera énorme pour un bâtiment de cette taille qui peut accueillir 500 personnes. Petit à petit, les choses avancent.

Vous avez l’impression d’apprendre à chaque projet ?

Quand j’ai commencé à travailler sur le Moufia il y a 5 ans, je pensais que si j’isolais, que j’étais traversant et que j’avais mis des jalousies des deux côtés, j’avais fait le boulot. Et bien non. Ca marche peut-être pour une case qui fait 10 mètres de large mais ça ne marche plus du tout pour un bâtiment de 35 m de large. Il faut innover. Il a fallu chercher d’autres solutions, toujours en utilisant le vent. Ca veut dire qu’on a des entrées d’air différenciées selon les façades, que l’air qu’on fait rentrer, on le fait rentrer sous les gradins, qu’on crée une dépression en toiture avec un canyon, une sorte de cheminée horizontale qui va jouer le rôle de pompe. Et là, il y a pas d’extracteurs, pas de brasseurs d’air. Ca marche de manière passive. La seule chose que j’ai besoin, c’est d’ouvrir le canyon en haut.

Revenons à Marseille

Mais on revient toujours à Marseille !

Histoire de voir si vous êtes un vrai marseillais : quel est le résultat de l’OM ce week-end ?

Ah l’OMÇa fait partie de mon enfance, j’allais voir les matchs.  D’ailleurs à ce propos, le nouveau stade vélodrome, je le déteste. Je trouve que c’est minable. D’ailleurs, il suffit de te mettre sur laterrasse du Corbu pour voir à quel point il a mal été conçu, cette espèce de galette qui ressemble à un reblochon qui aurait été posé dessus. Il est mal fait; il y a des endroits où la courbe aurait pu être parfaite et créer une ondulation, c’est un geste raté. Mais bon, il y a plus de spectateurs et ils sont mieux abrités. Quand il y a l’OM qui joue bien, les gens vont mieux. C’est con à dire, mais c’est la vérité. A Marseille on a toujours l’impression que le monde entier nous en veut, et surtout les parisiens. Bon, c’est vrai, les Parisiens nous en veulent et le monde entier aussi

Vous n’êtes pas un peu de mauvaise foi  ?

Non,  juste Marseillais.


Entretien : Laurent BOUVIER

 

Le Nouveau Marseille architectural d’Olivier Brabant

LE MUCEM DE RICCIOTTI

Rudy Ricciotti, architecte du Mucem à Marseille. ©C. Delfino
Rudy Ricciotti, architecte du Mucem à Marseille. ©C. Delfino

Le MUCEM a changé la donne dans ce quartier. Je suis un fan. Bon, il faut dire que j’aime beaucoup RicciottiAutant il a fait des projets plus critiquables, autant là, c’est très réussi.C’est vrai que le site aussi est extraordinaire. Il a une idée urbaine très intéressante et très républicainedésintéressée, ce qui n’est pas évident pour lui: il donne à la ville. Je suis allé plusieurs fois au MUCEM, je crois que je n’ai visité les collections qu’une fois, par contre y retourner pour me balader sur la terrasse, passer du fort Saint-Jean au MUCEM sur sa magnifique passerelle qui est comme un muscle qui relie le neuf avec l’ancien, je l’ai fait des dizaines de fois. C’est très tendu, magnifique, il a donné cette promenade aux marseillais. Elle est gratuite,comme la terrasse. On se rend compte quand on passe entre son moucharabié de béton et les façades intérieures qu’il a la compréhension intime de cette ville où le soleil est très important. A Marseille on ne marche pas au soleil, sauf les touristes. J’ai passé mon diplôme avec Ricciotti et j’ai travaillé un peu chez lui, c’est un super architecte.

LA TOUR DE LA CMA-CGM (ZAHA HADID)

© Philippe Ruault
© Philippe Ruault

La CGM, c’est le premier employeur de la ville, un géant mondial, une entreprise créée par des marseillais, une réussite formidable, c’est un phare, ils se le sont payés, et en plus ils transportent des conteneurs alors c’est pas scandaleux, ils prennent Zaha Hadid pour faire une tour quasiment plus haute que Notre-Dame. Je déteste Zaha Hadid mais là je reconnais qu’elle a compris, un peu comme Franck Gehry à Bilbao, la puissance industriel du siteBilbao, c’est un chaos industriel, des voies ferrées dans tous les sens, des conteneurs, un abandon total, une fin de ville abominable, un chaos quGehry retranscrit dans son architecture, et ça a changé du coup la ville. Zaha fait la même chose, sur ce site abominable, des passerelles autoroutières qui s’interpénètrent dans tous les sens. Elle en fait un geste fort, qui a du sens mais qui de mon point de vue, est violent.